Claudio Strinati avec Raphaël
Claudio Strinati révèle, au fil des pages, la vérité dun peintre qui, dans litinéraire le conduisant dUrbino à Città di Castello, à Florence, à Rome enfin, trouve et approfondit son langage pictural, synthèse excédant ses modèles, tendue vers un pur idéal artistique. Saffranchissant des influences opposées de Perugino et du Pinturicchio, il peint maintes Madones et saintes Familles pour des commanditaires influents, où sa main et celles des nombreux artistes de son atelier se fondent et se confondent. Maître de linvention et de la composition, son art du dessin, de la chromie et du modelé éclate dans son premier chef-duvre, la Mise au tombeau, où la savante architecture des corps séquilibrant et linflexion du mouvement sont admirables. Le Portrait de Jules II et la Madone de Lorette, conçus pour être mis en regard, esquissent le tournant artistique opéré par Raphaël : le pape contemple la scène familière de la vérification de la nature divine et humaine du Christ et assiste à la révélation du mystère divin. A Rome, la réalisation des Chambres vaticanes le consacre peintre et héraut de la papauté. La Chambre dHéliodore, véritable poème nocturne, et la Délivrance de Saint Pierre, où les jeux de lumière et de ténèbres préfigurent Caravage, marquent lavènement de sa manière, à laube du pontificat de Léon X. Le Portrait de Baldassare Castiglione illustre le thème novateur de la présence du regard quélude au contraire la copie dramatisante de Rubens ! Au faîte de sa gloire, Raphaël est nommé praefectus (surintendant) des antiquités romaines et reçoit la charge darchitecte général de la Curie. Il consigne, dans une lettre adressée au pape et rédigée avec laide de Castiglione, sa volonté de résurrection de lAntiquité, dunion entre lantique et le moderne, quil réalise dans les loges vaticanes ou dans celle dAgostino Chigi. Enfin, la Transfiguration, testament inachevé, au double visage sublime et démoniaque, porte à lextrême la dualité stylistique de Raphaël, entre trait granitique et sculptural et classicisme absolu.La douce majesté et lordre eurythmique de Raphaël (Baudelaire), la grâce de sa manière et la vénusté de ses figures, la force de la composition sous-tendue par une rayonnante esthétique des regards concourent à la totalité de luvre dart. La peinture pouvait bien, quand ce noble artiste mourut, mourir elle aussi car, lorsquil ferma les yeux, elle resta presque aveugle, conclut Vasari à la fin de sa Vie du peintre dont il sut, le premier, montrer luniversalité.